Mister Pitiful – Otis Redding

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Otis Redding est un chanteur emblématique du label STAX à la carrière fulgurante. (il meurt à 26 ans dans un accident d'avion) Mister Pitiful est apparu en 1964 sur l'album The Great Otis Redding Sings Soul Ballads.

 

Instrumentation

Outre la voix du chanteur, on peut entendre une section rythmique composée d'une batterie, une guitare, une basse et un piano. (Il s'agit en fait de Booker T. and the MG's, les musiciens du label) L'ensemble est complété par une section de soufflants dont on distingue des saxophones baryton et ténor ainsi qu'une trompette. (il y en aurait en fait deux)

Style

Il s'agit d'un morceau dans le plus pur style Soul. On retrouve le son très «garage» et saturé de la batterie, la voix et les vents bien mis en avant et le piano intervenant dans le fond sans jamais prendre l'ascendance.

La basse joue un rôle central en se basant sur un riff qui varie en suivant la grille. La guitare a un son très inscisif et joue sur les temps, en même temps que la grosse caisse et la caisse claire.

L'ensemble joue très «droit» et laisse peu de place au hasard.

Structure globale

Le morceau est en Do majeur. La grille harmonique se développe sur les trois seuls accords de Do majeur, Sol majeur (dominante) et Fa majeur. (sous-dominante) Le déroulement se découpe comme suit :

  • Une introduction de 4 mesures,
  • 2 couplets de 16 mesures chacun,
  • Un pont de 12 mesures,
  • Un dernier couplet de 16 mesures,
  • Le retour de l'introduction qui se termine  en fade out.

Écoute détaillée

Introduction

Le morceau est introduit par une anacrouse des vents. (trompette et baryton) Au premier temps de la mesure suivante – en fait sur la croche qui la précède – la rythmique est lancée : riff de basse et de batterie, martellement de la guitare sur chaque temps. Le tout sur un accord de do majeur.

La phrase des soufflants est composée de deux motifs de trois notes chacun. Le premier est un arpège de do majeur. La réponse, contenant un mi bémol, donne un caractère bluesy à l'introduction. Il est à noter que le piano laisse entendre un si bémol, renforçant cette couleur.

Introduction des soufflants 

À la quatrième mesure un break laisse la place à la voix, soulignée par un fill de batterie.

Couplet 1

Chaque couplet dure 16 mesures. La grille se déroule comme suit :

Grille des couplets
C7%%%
C7%G7%
C7%F7%
C7G7C7%

Dans ce premier couplet, seule la section rythmique accompagne la voix. La basse effectue le même riff que dans l'introduction en le transposant sur chaque accord. Tout le long de la grille, le piano laisse entendre les septièmes des accords ainsi que des inflexions sur les tierces.

Ce Riff de basse (ici en Do) est transposé en suivant la grille

 À la fin du cycle de 16 mesures, un break introduit le deuxième couplet qui est marqué par le retour des soufflants.

Couplet 2

 La section rythmique continue d'avancer selon le même modèle. Les vents (trompette et sax ténor) ponctuent à présent chaque mesure. Deux points sont remarquables :

  1. D'une part, contrairement aux instruments de la rythmique, les instruments mélodiques ne transposent pas leurs ponctuations selon la grille mais plutôt en suivant des mouvements minimaux entre les voix.
  2. Certaines interventions se font par approche chromatique inférieure, et ce indépendament de la grille. On entend ainsi une septième majeure intervenir à la trompette sur le Do 7.

Ce deuxième couplet s'achève à son tour avec un break. Cette fois, seuls les vents jouent. (même la batterie garde le silence)

Pont

 Bien qu'il ne dure que 12 mesures, ce pont peut être découpé en deux parties. Lors des quatre premières mesures les vents continuent la phrase entamée à la fin du deuxième couplet, sur un accord de Do7. On note que la guitare se tait et que le piano change le rythme et la tessiture de son accompagnement.

Les huit mesures suivantes alternent entre deux mesures de Sol7 et deux mesures de Do7. La transition entre les accords se fait sur deux temps selon la figure rythmique suivante. (Toute la section rythmique joue la mise en place)

Transition entre l'accord de Do7 et Sol7 dans le pont

La douzième mesure du pont est à nouveau le siège d'un break avec fill de batterie.

Dernier couplet

Ce couplet se déroule comme le deuxième à ceci près que le piano joue avec plus de liberté et dans un registre plus aigu.

Retour de l'introduction

Le morceau se termine sur un accord de Do7 et avec les riffs de soufflant et de basse de l'introduction. Le piano gagne en liberté. (et est moins audible) On remarque le jeu de question et réponses entre la guitare et la batterie :

Jeu de questions réponses entre guitare et batterie sur la fin

La voix d'Otis Redding explose dans un bouquet final.

Conclusion

Cette chanson raconte l'histoire de quelqu'un qui a tout perdu. L'arrangement de ce morceau est tel que la voix qui nous la raconte est toujours mise en valeur. La rythmique tirée au cordeau n'offre que peu de variations à des moments bien choisis. Lors des parties chantées, la section de vent joue un rôle de ponctuation similaire à celui de la guitare.

Le morceau est découpé en six parties reliées entre elles par des breaks. Lors des changements de son d'orchestre, les nouveaux instruments sont entendus au cours de ces breaks.

L'écriture est simple est directe : La section de vent utilise rarement plus de 2 voix à la fois et la rythmique tient son rôle du début à la fin. Seul le pont, vers le milieu du morceau propose un changement dans les rôles, avec une brève incursion des vents dans un rôle mélodique ainsi que quelques mises en places rythmiques.

Le final voit se disputer les rôles, où chaque instrument semble vouloir sortir du lot.